samedi 7 juillet 2012

Concordia, des remarques pertinentes

On peut dire ce qu'on veut, nous ne sommes pas sur l'île de Giglio et nos propres hypothèses ne sont que des suppositions invérifiables.
Je voudrais, en entrée en matière, citer deux habitants de l'île. D'abord Zeurino, marin, qui emmène les plongeurs sur le Scole avec son bateau et leur indique les merveilles à aller voir. Il a déclaré ceci à Valérie Dupont, journaliste à Lalibre.be, envoyée à Giglio le lendemain de l'échouage du Concordia :

"Les rochers ne se trouvaient pas sur la carte marine ? Mais voyons, je navigue sur ces eaux depuis cinquante ans et ‘Le Scole’, ce petit rocher de granite, je le connais par cœur. Ici, en dessous, c’est magnifique. Il existe une tour de granite à 24 m de profondeur et sur cette tour, sont plantées des ancres de bateaux que jamais personne n’a réussi à enlever. Et sur le fameux rocher, que le commandant du Concordia a heurté, se trouve un festival de crustacés."

Ensuite, une dame âgée qui ne donne pas son nom :
  "Ce bateau, un gratte-ciel des mers, a déjà abîmé l’île et cela pour toujours. Vous avez vu, dans sa coque, le morceau de granite que la folie de ce commandant a emporté Eh bien, ce rocher, avant vendredi soir, dépassait de l’eau d’au moins deux mètres, les enfants venaient s’y assoir en été lorsqu’ils étaient fatigués de nager. Ce rocher de granite a disparu pour toujours !"

 Alors, si je n'émets pas de doutes sur ce que dit Zeurino, qui passe sa vie sur le Scole, j'ai un peu plus de mal à croire que cette dame ne confond pas ce rocher avec un autre. Si l'écueil avait dépassé de deux mètres, la plaie du Concordia serait dans la partie blanche de la coque. Or, ce n'est pas le cas. Il s'agissait donc bien d'un récif immergé et je ne vois pas de raisons de douter de la véracité des affirmations de la Guardia Costeria qui montre la cassure du rocher dans une vidéo dont voici une image.


Pour ce qui est de savoir si ce rocher était ou non sur la carte consultée par Francesco Schettino, il faut d'abord déterminer de quelle carte il s'agit. Le Costa Concordia, comme le déclare assez maladroitement Georgio Moretti dans son discours sur la sécurité, était doté d'instruments de mesure et de navigation efficaces et modernes. Ces instruments sont certainement électroniques et retransmettent les informations sous forme de fichiers numériques. Or, le numérique est soumis à des caprices imprévisibles. La carte papier est plus fiable, encore faut-il que quelqu'un la consulte effectivement.


Ted, capitaine, explique : I noticed it very often that officers standing in front of ECDIS (Eletronic Charts) and when you ask them look out of the window,,they have no clue where they are !!! The main reason for that is,that nowadays naut officers are teached by people who never sailed.  

 J'ai remarqué très souvent que les officiers qui se trouvent devant les cartes électroniques de l'ECDIS, quand vous leur demandez de regarder par la fenêtre n'ont pas la moindre idée de l'endroit où ils se trouvent !!! La principale raison pour cela est que, de nos jours, ceux qui enseignent aux officiers de marine n'ont eux-même jamais navigué.

They are professors in their line of teachings, mathematics for example, but if you ask them what is a ship,they look at you like you are from another planet. Secondly, all are teached first nowadays how to operate electronic systems and how to push this and that buttom, but almost nothing about that why this or that buttom is pushed and what the results, then viewable, are good for.

Young nautical officers nowadays have programs to determine from where the wind comes.

Ils sont professeurs dans leur enseignement, mathématiques par exemple, mais si vous leur demandez ce qu'est un navire, ils vous regardent comme s i vous êtes d'une autre planète. Deuxièmement, on leur enseigne à tous en premier comment se servir des systèmes électroniques et comment pousser tel ou tel bouton, mais presque rien au sujet du pourquoi de ce bouton-ci ou de ce bouton-là et à quoi sert le résultat affiché.
De nos jours, les jeunes officiers de marine ont des logiciels pour déterminer d'où vient le vent.

Alors, on peut effectivement s'interroger sur le degré de compréhension des informations données par les instruments de mesure ultra-modernes du Concordia, qui sont conçus et dont le fonctionnement est enseigné par des personnes n'ayant pas d'expérience de navigation. Pour diriger un bateau de croisière, il y a 75% de cours théoriques et seulement 25% de pratique. Est ce que ça ne devrait pas plutôt être le contraire ? En théorie, tout se passe toujours bien et sur un simulateur, si vous vous trompez de route, la sanction, c'est juste un écran d'erreur, sur la mer, il en va tout autrement.

Ecoutez Georgio Moretti, directeur des opérations maritime chez Costa Croisières. Il explique dans cette vidéo, que les instruments de mesures des navires de sa compagnie permettent à l'officier de garde d'établir avec certitude la position du navire, que les itinéraires sont programmés par l'officier responsable de l'hydrographie, que les données sont ensuite transposées sur les cartes nautiques et que le commandant les passe en revue et les valide en fonction du plan de voyage précédemment effectué. Tout ça prend du temps. Il ne faut pas, en plus avoir des obligations mondaines et d'autres responsabilités de type commercial.

La course au profit oubliera vite les trente-deux victimes du Concordia si les normes de sécurité dont se prévalent les compagnies de croisières n'évoluent pas. N'oublions pas que c'est grâce au Titanic que les navires sont équipés de chaloupes en nombre suffisant et d'un gilet de sauvetage au minimum par personne présente à bord. A présent, plutôt que de s'intéresser à la manière de sauver des vies en cas d'avarie, il serait bien de penser à prévenir les naufrages.

Krn  07/07/2012

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